lundi 25 août 2014

Quelques aides de jeu pour Agôn

Avant-propos : dans le cadre de notre campagne de jeu à Agôn, je continue à développer quelques aides pour nos parties. Vous trouverez donc dans ce billet les divers éléments que j'ai mis en place pour faciliter le suivi des Quêtes pour les Héros, ma règle optionnelle pour gérer l'Hubris et les Hauts Faits, ainsi qu'un petit teaser pour les scénarios de cette campagne que je suis en train de compiler et mettre en forme.

Quêtes


Notre campagne d'Agôn s'est poursuivie hier après-midi avec à la clef deux nouvelles quêtes pour les Héros. Avec les trois quêtes précédentes, cela faisait cinq quêtes à suivre pour les Héros. Sachant que les conditions de réussite d'une quête sont parfois subtiles, j'ai décidé de fournir à mes joueurs une petite aide de jeu afin qu'ils puissent avoir un accès à tout moment aux termes exacts de la quête qu'ils souhaitent accomplir.

Voici ci-dessous le détail et l'aide de jeu pour les cinq quêtes en question.






Cette aide de jeu s'est déjà avérée utile car elle a évité aux joueurs de rater la quête d'Héphaïstos pour un petit détail qu'un des joueurs a bien heureusement relevé pour eux. A voir si cette aide se montrera aussi utile pour la résolution des autres quêtes.

En parallèle de la maîtrise de ces scénarios, je suis en train de les mettre au propre pour qu'ils soient exploitables ou sources d'inspiration pour d'autres Antagonistes. Vous trouverez ci-dessous un aperçu de le forme que prendront ces scénarios une fois compilés et mis en forme.


Hubris et Hauts Faits


N'étant pas fan de la règle existante pour l'Hubris j'ai eu envie d'en créer une autre et également par la même occasion de valoriser les Hauts Faits plus que de simplement en tenir les archives. Pour chacune des 16 compétences, j'ai écrit une carte associée, que le joueur, dont le personnage a réalisé le meilleur jet dans cette compétence au-dessus d'un seuil fixé par l'épreuve associée, prend devers lui. Puis lors d'un test futur de cette même compétence, s'il devait échouer ou faire moins bien qu'un de ses petits camarades, il pourrait bénéficier d'une relance gratuite du dé de compétence correspondant (équivalent à ce qui existe déjà dans les options d'utilisation des points de faveur divine) en invoquant l'Hubris (impossible !!! moi Dioklès aux membres puissants, qui pourrait rivaliser avec Héraklès, je ne peux pas me faire battre dans une épreuve de bras de fer !!!) et en remettant en quelque sorte son titre (i.e. sa carte) en jeu.


Vous trouverez ces cartes dans la colonne de droite à la rubrique "mes réalisations ludiques".

A l'usage pour l'instant, cela n'a pas significativement déséquilibré le jeu, et reste bien dans l'ambiance de compétition "bon enfant" d'Agôn.


Pour conclure : n'hésitez pas à me dire ce que vous pensez de ces aides de jeu et de la règle optionnelle que je propose pour la gestion de l'Hubris et des Hauts Faits. Est-ce que vous autres MJs à Agôn avez également développé des outils pour vos joueurs ou pour vous faciliter la maîtrise de vos parties ? Avez-vous également modifié certaines règles ou bien jouez-vous "by the book" ?

samedi 9 août 2014

Le "Problème Pandémie" - Le méta-problème des jeux coopératifs

Avant-propos : j'ai lu récemment le livre d'Ignacy Trzewiczek, "Board Games ~That Tell~ Stories". Ce livre se veut d'abord une compilation des meilleurs articles de son blog qui relate son expérience en tant que concepteur de jeux de plateau. Mais en seconde partie de ce livre, on peut trouver une collection de témoignages d'autres auteurs de jeux comme Bruno Cathala, Seiji Kanai, Rob Daviau ou bien encore Mike Selinker. C'est le témoignage de ce dernier que je vais en partie traduire et présenter ici. Il aborde ce qu'il appelle le "Problème Pandémie", du jeu éponyme, et qui en fait pourrait se généraliser comme le problème des jeux coopératifs.




Trouver le remède au "Problème Pandémie"


Mike Selinker raconte :

"Le problème des jeux coopératifs est un méta problème. Ce n'est pas un défaut des règles ou une intention délibérée du jeu. C'est un problème avec les gens qui y jouent. Pour l'expliquer, je dois retourner aux origines du jeu de rôle.

Quand D&D est apparu dans les années 70, les règles décrivaient un joueur appelé "the caller". Ce n'était pas une classe de personnage comme le guerrier ou le clerc. C'était un rôle hors du jeu qui complétait le "mapper", dont le boulot était de tracer la carte du donjon. Le boulot du "caller" était de surveiller ce que le mapper dessinait et de prendre des décisions stratégiques pour toute l'équipe d'aventuriers. Un "caller" aurait pu dire cela :
"Le guerrier charge le gobelours pendant que le magicien arrose ses sbires gobelins avec des missiles magiques. Pendant ce temps, l'elfe se faufile derrière le gobelours pour lui planter une dague dans le dos."
Notez qu'il n'est pas clair quel personnage le "caller" jouait. C'est sans importance. Il les jouait tous.
Avec une personne faisant les "calls", le jeu était une expérience équilibrée. Le DM jouait un côté et le "caller", habilement encouragé par le reste du groupe, comme voulu, jouant l'autre côté. Tout ce qui restait à effectuer c'était les jets de dés.

Quand les éditions suivantes de D&D sortirent, le rôle du "caller" diminua puis disparu complètement. Les concepteurs du jeu ont réalisé que les joueurs voulaient faire leurs propres choix, ainsi désigner une personne parlant au nom de tout le monde était contre-productif. Le système d'initiative, qui détermine dans quel ordre les personnages agissent, a rendu le "caller" obsolète, puisque chaque joueur était mis en avant l'un après l'autre.

Avancée rapide dans les années 80, quand les jeux semi-coopératifs apparaissent. Les jeux quasi similaires Scotland Yard et la Fureur de Dracula mettent en avant un joueur incarnant un méchant (Mr X et Dracula), et tous les autres joueurs se battent contre lui. Ceci met clairement en parallèle la dynamique DM / joueurs des jeux de rôles, et le "Problème Pandémie" était né, 20 ans avant que le jeu Pandémie ne soit créé.

Dans une partie de la Fureur de Dracula, les chasseurs vont comploter contre le personnage incarnant  Dracula, et ensuite, assez souvent, un des chasseurs va dire quelque chose dans le style:
"Lord Godalming va à Barcelone, puis Dr. Steward va à Clermont-Ferrand et ensuite Van-Helsing va à Zagreb."
Dans un sens, il n'y a rien de mauvais dans ce type de stratégie. Avoir un chasseur "leader" rend le boulot de chacun plus facile, puisque tous les joueurs, y compris celui incarnant Dracula, savent ainsi ce qu'il va advenir. Le problème survient quand le joueur disant cela n'est en fait pas vraiment intéressé par l'opinion des autres. Cela se traduirait par une phrase plutôt dans le style:
"Okay, tu vas à Barcelone, et toi à Clermont-Ferrand. Ensuite, j'irai à Zagreb. Voilà ce que nous faisons."
En réalité, personne ne tenait un flingue sur la tempe de ces joueurs. Certains pourraient avoir voulu un commandant charismatique. Mais certains préfèraient alors rentrer chez eux. Réduit au fait de regarder deux joueurs s'amuser, Dracula et le "chasseur leader", certains joueurs trouvèrent qu'ils avaient mieux à faire avec leur temps."

Mike Selinker explique ensuite, qu'après la sortie de Pandémie en 2008, il a rencontré des joueurs qui ont juré de ne plus jamais jouer à des jeux coopératifs uniquement du fait de leurs mauvaises expériences avec des "callers" à Pandémie. Mike Selinker propose deux solutions pour résoudre le problème des jeux tels que Pandémie :
- faire un jeu coopératif en le rendant moins coopératif, c'est à dire en créant un twist à un moment du jeu avec l'apparition d'un traître (Betrayal at House on the Hill, Battlestar Galactica, Chevaliers de la Table Ronde par exemple),
- faire un jeu où les joueurs tiennent à leur personnage. C'est ce qu'il annonce avoir accompli avec le jeu de cartes Pathfinder.

Pathfinder - le jeu de cartes



Mike Selinker dit qu'il a créé avec ce jeu une nouvelle sorte de persistance (la même idée que Risk Legacy), rendant possible le fait que le personnage évolue, change et même meurt, ceci en laissant le joueur garder et remodeler son personnage pas seulement durant une partie, mais pendant des mois voire des années. Un personnage commence avec un éventail de cartes: 5 sorts, 3 armes, 2 bénédictions, etc. Et pendant un scénario, les personnages acquièrent quelques unes de ces cartes en plus. Mais à la fin, ils doivent revenir à leur configuration de jeu initiale, c'est-à-dire que pour chaque carte d'un type donné qu'ils ont gagné, ils doivent se séparer d'une autre carte du même type. Mike Selinker dit qu'il a basiquement créé le jeu de deck-building le plus lent du monde. Et que cela marche.

"Les joueurs se sont attachés au personnage qu'ils ont choisi. En acquérant de nouveaux objets et sorts, ils savaient qu'à la fin, ils mettraient en commun toutes leurs nouvelles acquisitions lorsqu'ils reconstitueraient leur deck. Mais en fait, ils ne le firent pas. Pas totalement en tout cas. Quand un joueur disait, "ce sort de soins est mieux pour toi que pour moi", le sous-titre était, "je l'aurai bien gardé, mais j'ai de meilleurs choix, et je veux que tu le prennes pour que tu puisses me soigner quand j'en aurai besoin si les choix que j'ai fait ne se montrent pas si efficaces que cela." Encore une fois, ils étaient dans le même camp, jusqu'au moment où ils ne l'étaient plus."
Mike Selinker attribue la popularité de son jeu à l'attachement des joueurs pour leur personnage en directe violation de l'esprit coopératif du jeu. Ma courte expérience avec ce jeu ne me permet pas en l'état de juger de l'objectivité de cette affirmation, d'autant que mon personnage est mort lors du second scénario...alors on ne peut pas dire que je m'y étais réellement attaché !

Et dans le jeu de rôle ?


La définition du "Caller" dans l'édition Moldvay de Basic D&D est la suivante :
THE CALLER: One player should be chosen to tell the DM about the plans and actions of the party. This player is the caller. The players may tell the DM what their characters are doing, but the game runs more smoothly when the caller relays the information. The caller should be sure to check with each member of the party before announcing any actions (such as "We'll turn right" or "The thief will check for traps"). The caller is usually a character with a high Charisma score, and should be near the front of the party, where the character would be able to see what the DM describes.
Il était tout de même précisé que le "Caller" devait voir avec le reste du groupe avant de déclarer les actions...mais il est possible qu'à certaines tables de jeu cette règle, comme d'autres, n'ait pas été appliquée à la lettre.

Lors de notre campagne à D&D4, nous avions mis en place la "minute de réflexion", durant laquelle avant chaque tour de combat nous mettions au point une stratégie commune pour le tour, permettant d'assigner à chacun en concertation son rôle pour le tour de combat, et ce en essayant d'optimiser les compétences de chaque classe de personnages présents. Ceci n'était pas parfait, et il est arrivé lors de certains combats où un personnage avait l'ascendant et dominait totalement un monstre, que d'autres joueurs se sentent frustrés que ce dernier ne veuille pas partager le "kill"...

Ironiquement, un jeu comme Agôn, que certains dénigrent parce qu'il introduit un semblant de compétition (amicale) entre les joueurs et leurs personnages, a une règle pour gérer les problèmes de "leadership" entre les joueurs. Si plusieurs joueurs ne sont pas d'accord sur la marche à suivre, il suffit de départager les personnages avec un test d'éloquence, et le vainqueur décide alors de ce qu'il advient.

Pour conclure : le problème présenté ici n'est en aucun cas exclusif au jeu Pandémie (que je n'ai d'ailleurs jamais testé) car il se retrouve dans de nombreux autres jeux: Andor, Zombicide, L'île Interdite, pour n'en citer que trois auxquels j'ai joué et qui me viennent à l'esprit. Et vous, connaissez-vous d'autres jeux, qu'ils soient de rôle ou de plateau, qui présentent ce problème ? Avez-vous une idée pour résoudre ce problème ? A moins que vous ne considériez que ce n'est pas un problème ? Si vous avez joué au jeu de cartes Pathfinder, que pensez-vous de l'avis de Mike Selinker et de sa proposition pour gérer le "Problème Pandémie" ?